Voici la lettre envoyée à la ville à la suite de cet événément.
DE : Association
CARTON PLEIN Saint-Étienne, le 12 avril 2013
45 rue
Étienne-Boisson
42000
Saint Etienne
0674947949
A : Ville
de Saint-Étienne
Objet :
Demande de rendez-vous – suite au projet “Parcours de jeu” -
exposition empathiCITY Making our city together / Biennale du design
2013
Monsieur
le Maire,
Mesdames
et Messieurs les élus de Saint-Étienne,
CARTON
PLEIN est une association créée en 2010 sous l'impulsion de l'EPASE
autour d'un site laboratoire : la Cartonnerie. Voilà 3 ans que nous
travaillons à animer et concevoir cet espace public temporaire en
cherchant à dynamiser le quartier Jacquard, Montaud, Carnot et la
ville de Saint-Etienne, en créant des connexions entre les
institutions publiques (mairie, EPASE, école d'architecture, école
d'art et design, université Jean Monnet), et les associations,
amicales laïques, MJC du quartier, écoles publiques maternelles et
élémentaires voisines, collèges et l’ensemble des personnes qui
fréquentent le site de la Cartonnerie.
Cet
espace est précieux car il fédère les personnes et les énergies.
Il nous stimule et nous encourage, habitants ou jeunes
professionnels, à vivre et exercer nos métiers, tous liés aux
dimensions urbaines de la vie sociale, de l'architecture, du design,
à Saint-Etienne. Dans cette ville, nous avons le sentiment que les
partenaires, techniciens institutionnels et aménageurs sont à
l'écoute de ces démarches expérimentales, qui prennent alors tout
leur sens. C’est être à la fois audacieux et innovant de prendre
la mesure de ces valeurs et partages, de s’en saisir pour imaginer
la ville de demain, d’autant plus vivante qu'elle développe ses
propres singularités.
L'association
CARTON PLEIN a été sollicitée pour être commissaire local
d'exposition pour l'exposition EmpathiCITY/ Making our city together
dans le cadre de la Biennale Internationale du Design 2013. En
outre, Josyane Franc et Laetitia Wolf, commissaires générales de
l’édition 2013 réunissant les projets exemplaires des Villes
UNESCO Design, ont invité l’association à interagir durant la
Biennale par l’intermédiaire d’un projet.
Nous leur avons donc proposé de concevoir un projet qui repose sur
l'accueil de designers dans un territoire : « Parcours de
Jeu ». Ce projet poursuit l'action que nous menons à bien
depuis 2010 et qui défend une démarche de création « ancrée »
sur un espace. Travailler « in situ » c’est prendre le
temps nécessaire et indispensable pour observer attentivement,
appréhender, écouter les lieux et ses habitants, connaître la
ville et ainsi être en mesure d'y développer des propositions
pérennes ou plus événementielles, en phase avec le contexte
urbain.
Le
projet « Parcours de Jeu » a été financé par la Cité
du Design et l'EPASE, et mobilisait les ressources propres de
l'association CARTON PLEIN. Ce projet a également été conventionné
avec la Ville de Saint-Etienne (partenaire technique). Ainsi,
chaque mois un comité de pilotage se réunissait, formé par les
membres signataires de la convention, les équipes de designers et
l’association CARTON PLEIN, également signataire car porteuse du
projet.
Les
deux équipes de designers (Lola Diard et Juliana Gotilla, Laure
Bertoni et Sébastien Philibert), sont donc restés 6 mois en
résidence dans le quartier Jacquard pour travailler avec les
habitants et les structures locales à l'activation à l'émergence
de nouveaux espaces publics.
L'une
des installations de ce "Parcours de jeux" a été réalisée
le long du boulevard urbain. L’architecte et la designer de ce
projet, Lola Diard et Juliana Gotilla, ont passé des journées
entières à observer et recueillir les points de vue, collecter les
trajets des habitants et passants. L'ensemble des données d'enquête
recueillies, les paroles habitantes ont été triées et choisies au
regard de leur force de représentation et au regard de la
diversité des points de vue qu'elles permettaient. Ces extraits de
paroles habitantes construisaient ainsi une mosaïque d'expressions
libres où tout un chacun, passant, piéton ou automobiliste, ou
encore voyageur depuis le train, habitant, pouvait ainsi interroger
librement à son tour l'espace traversé, se reconnaître ou non dans
ces perceptions. L'objectif de ce travail de récoltes puis de
restitution était d'ouvrir l'espace du débat, de découvrir de
nouveaux cheminements dans la ville, d'activer ainsi de nouvelles
circulations dans l'espace public.
Cette
installation artistique a été autorisée par écrit par le
Patronage Saint Joseph à qui appartient le mur et suivi tout au long
de sa conception puis réalisation par le Frère Michel, représentant
du Patronage. Le projet d'installation a été présenté et approuvé
lors des comités de pilotage successifs réunissant nos
interlocuteurs de la Ville, de l'EPASE, et de la Cité du design, au
fil de sa conception. L'installation a mobilisé également une
trentaine de bénévoles et donnait la parole à 32 habitants
rencontrés sur ce trottoir dangereux de bord de boulevard.
L'installation a été réalisée en deux phases : du 21 au 24
Février 2013 peinture d'une bande jaune de 60 cm de large sur 80
mètres de long sur le mur longeant le Boulevard Alfred de Musset
puis du 7 au 9 Mars 2013 peinture des graphismes et textes sur la
bande jaune.
Nous ne
vous cachons pas que lorsque nous avons été appelés successivement
par nos interlocuteurs Ville, Cité et EPASE, pour nous annoncer
l'effacement sélectif de ces paroles, nous avons été profondément
choqués par cette entreprise radicale, immédiate et
discrétionnaire. Notre dialogue permanent, constructif et ouvert,
établi avec la mairie et ses services autour de ces projets, le
processus et les étapes partagées, validées, s'en sont trouvé de
fait disqualifiés !
CARTON
PLEIN a pour vocation de travailler dans l'espace public démocratique
et ne comprend pas ni l'attitude de la ville ni les arguments qui ont
motivé l'effacement de cette installation artistique. Pourquoi ne
pas avoir prévenu la commissaire d'exposition et les artistes ?
Comment est-il possible d'effacer une œuvre en cours d'exposition
dans le cadre de la Biennale Internationale de Design ? Au-delà de
l'acte de censure lui-même, pourquoi ne pas avoir sollicité
promptement une rencontre collective pour élucider la question
ensemble ?
Depuis des mois, l'ensemble de l'équipe joue le jeu de la complexité des acteurs, de l'adaptation aux contraintes et de l'ouverture au dialogue pour construire ce projet. Cette attitude radicale révèle-t-elle une forme de mépris pour les acteurs associatifs locaux qui agissent concrètement et de manière engagée pour transformer leur ville positivement en la rendant plus attractive et apaisée ? Mais peut-être aussi pour l'art dans l'espace public, pourtant sujet d'un colloque à la Cité du design "la commande publique - une démarche artistique intégrée?" où nous avons noté l'intervention de Florent Pigeon ?
Depuis des mois, l'ensemble de l'équipe joue le jeu de la complexité des acteurs, de l'adaptation aux contraintes et de l'ouverture au dialogue pour construire ce projet. Cette attitude radicale révèle-t-elle une forme de mépris pour les acteurs associatifs locaux qui agissent concrètement et de manière engagée pour transformer leur ville positivement en la rendant plus attractive et apaisée ? Mais peut-être aussi pour l'art dans l'espace public, pourtant sujet d'un colloque à la Cité du design "la commande publique - une démarche artistique intégrée?" où nous avons noté l'intervention de Florent Pigeon ?
Il est
également particulièrement choquant de prendre conscience qu’à
la veille de l'effacement au karsher, le projet « Parcours de
jeu » était présenté devant l’ensemble des représentants
des villes UNESCO design. Les designers invités par CARTON
PLEIN représentaient la Ville de Saint-Etienne, portant les
valeurs mêmes que vous avez développées dans votre discours de
clôture, à savoir l'importance de l'empathie et de l'expression des
citoyens, moteurs de la réalisation d'une ville créative !
Dans
notre démarche, qui est une démarche citoyenne et responsable nous
défendons l'idée d'un espace public empli d'usages et de pratiques
diversifiés (non sans conflits mais c'est un des enjeux concret de
la conception et de l’aménagement même de ces espaces) où se
noue la rencontre à l'autre et l'idée d'un espace public
démocratique, où se construit du bien commun non appropriable par
qui que ce soit mais partageable par tous. Nous ne doutons pas que
vous partagiez ces valeurs pour que l'espace public demeure
envers et contre tout doit rester le lieu ouvert qui rend possible
les débats et les échanges.
Cette
intervention municipale nous parait encore aujourd'hui
incompréhensible. Nous avons attendu la fin de la biennale, trop
occupés à accueillir les nombreux visiteurs et à animer l'espace
public.
Nous
souhaitons, Monsieur
le Maire, Mesdames et Messieurs les élus de Saint-Étienne,
vous rencontrer afin que nous puissions discuter et échanger de cet
événement de vive voix. En
l'attente de vos propositions de dates de rendez-vous, veuillez
recevoir, Monsieur le Maire, Mesdames et Messieurs les élus de
Saint-Étienne, nos salutations distinguées,
Pour
les artistes du projet,
Pour
les membres et sympathisants de l'association Carton Plein,
Fanny
Herbert, Présidente de l'association
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